Libérer les graines des impuretés sans chimie

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Une nouvelle méthode pour hygiéniser les semences sans traitement chimique avant la plantation. C'est le défi que doit relever la start-up Viridhys Technologies Sàrl. Créée il y a quelques mois dans le canton de Fribourg, la jeune entreprise s'apprête à déménager à Romont. Dans la zone industrielle de la Maillarde, elle occupera l'ancien laboratoire de recherche de Tetra Pak, sur une surface d'environ 400 m2.
C'est sur ce site que Viridhys entend concevoir une usine pilote capable de traiter 200 kg de graines par heure. En cas de succès, la start-up prévoit de passer à la vitesse supérieure et de construire une installation capable de traiter une tonne par heure. "Dans l'agriculture conventionnelle, les semences sont enrobées de pesticides et de fongicides pour empêcher le développement des mauvaises herbes et donner aux cultures une meilleure chance de sortir de terre. Le problème est que ces produits se retrouvent dans les céréales et les plantes, ainsi que dans le sol", explique Frédéric Haase, fondateur de Viridhys, qui évoque également les dégâts sur la santé des agriculteurs.

Il s'agit d'un traitement physique qui élimine les impuretés. Sur les semences, il élimine les bactéries, les levures et les champignons de la surface.

La start-up se concentre sur le traitement des semences par plasma. En termes simples, si l'on applique de l'énergie à un gaz, celui-ci devient un plasma (le quatrième état de la matière, après les phases solide, liquide et gazeuse). Lorsqu'il entre en contact avec des matériaux solides, le plasma agit avec son énergie sur la surface affectée. "C'est un traitement physique qui élimine les impuretés. Sur une graine, il élimine les bactéries, les levures et les champignons de la surface", explique Frédéric Haase, qui précise que le traitement au plasma est utilisé dans de nombreux secteurs industriels, notamment l'automobile, la fabrication électronique, l'emballage et l'horlogerie.

Cette aventure entrepreneuriale est le fruit de quatre années de recherche. Le projet a débuté en 2017. Les recherches ont été menées en Allemagne et en Belgique avec le Frauenhofer Institut (rattaché à l'université de Fribourg-en-Brisgau) et Materia Nova (de l'université de Mons). D'ici 2021, la faisabilité a été démontrée pour les semences de blé, d'orge et de soja, avec des essais sur les grandes cultures. Un équipement capable de traiter 30 kg de semences par heure a été construit. "Au début, nous produisions du pop-corn. Les grains explosaient parce que l'énergie était trop élevée. Nous avons dû affiner les doses de traitement", explique l'entrepreneur.

La start-up estime que l'utilisation du plasma remplacera environ 25% des traitements fongiques existants pour l'agriculture conventionnelle. "Notre solution est également adaptée à l'agriculture biologique, pour laquelle aucun traitement physique n'existe actuellement. Les rendements peuvent être considérablement augmentés dans ce secteur de l'agriculture", prédit Frédéric Haase, qui note que la solution technologique nécessite très peu d'énergie.

Viridhys a approché des producteurs de semences en Suisse et à l'étranger. "Nous avons déjà une douzaine de précommandes en Amérique du Nord, en Europe et en Australie", assure Frédéric Haase, qui mise sur un système de location de matériel. "Nous serons 95% actifs sur le marché de l'exportation. Nos équipements sont faciles à transporter dans un container. A l'étranger, swisstech est un gage de sérieux et de crédibilité", affirme le CEO de Viridhys.

Après avoir consacré 2 millions de francs à la recherche, la start-up prévoit d'investir 2 à 3 millions de francs au cours des cinq prochaines années. Le projet mobilise actuellement une équipe de cinq personnes. "D'ici trois ans, nous pourrions être entre dix et quinze, mais cela dépendra de notre vitesse de développement. Notre technologie est disruptive, mais le secteur agricole est conservateur", concède Frédéric Haase.
En tout cas, le potentiel est énorme. Selon la start-up, les semences non biologiques représentent un marché de 30 millions de tonnes par an dans le monde. Le marché biologique s'élèverait à au moins 3 millions de tonnes par an. "La seule autre solution compétitive identifiée est un traitement à la vapeur développé par une entreprise suédoise. Mais cette technologie nécessite un niveau d'investissement élevé", compare le CEO de Viridhys.

Originaire d'Alsace, Frédéric Haase, 55 ans, est installé à Corminbœuf depuis 2019. Son parcours professionnel l'a conduit en France, en Allemagne et en Suisse. Après avoir travaillé dans l'industrie chimique, il s'est tourné vers les biotechnologies, puis vers le recyclage des matériaux. La start-up Viridhys bénéficie du soutien de Fri Up et d'un prêt d'amorçage de 100 000 francs de la fondation Seed Capital Fribourg. "Nous avons trouvé dans le canton de Fribourg ce que nous cherchions", conclut Frédéric Haase.